Prédication du 22 décembre 24 - Matthieu 1.1-24 - Dieu entre dans notre famille… pour nous faire entrer dans la sienne !
Noël, c’est Dieu qui entre dans notre famille humaine pour nous faire entrer dans sa famille, faire de nous ses enfants. Voilà résumé en quelques mots ce mystère de « l’incarnation » que nous méditons année après année en cette période, sans chacun faire le tour de cette incroyable réalité : Dieu s’est fait homme !
Un homme
véritable, avec non seulement un corps et un esprit d’homme, mais aussi… une
histoire familiale, et pas n’importe laquelle ! Voilà ce que Matthieu
met en avant en ouverture de son Evangile, commençant par donner la
généalogie de Jésus.
Pas simples
pour nous, ces généalogies de la Bible, ces longues listes de noms parfois
difficiles à prononcer. On a tendance à les sauter, en pensant qu’elles n’ont
pas d’intérêt pour notre foi… Bien au contraire ! Je vous invite ce matin
à relever le défi de lire et méditer la généalogie de Jésus, et nous
allons voir qu’elle nous dit des choses importantes à la foi sur Jésus… et sur
nous.
Je ne sais
pas si vous avez déjà vécu, dans votre enfance, ces repas de famille
interminables où les grands parlent d’ancêtres que vous n’avez pas connus… Pourtant,
en grandissant, on comprend parfois que ces inconnus du passé ont eu un impact
sur nous, plus ou moins direct.
Ce passage
peut nous donner un peu la même impression. Vous reconnaitrez quand même
certains des personnages évoqués. Lesquels ? Je vous laisse écouter…
Matthieu 1.1-24
1Généalogie
de Jésus-Christ, fils de David, fils d'Abraham.
2Abraham
engendra Isaac ; Isaac engendra Jacob ; Jacob engendra Juda et ses
frères ; 3Juda, avec Tamar, engendra Pharès et Zara ;
Pharès engendra Hesrom ; Hesrom engendra Aram ; 4Aram
engendra Aminadab ; Aminadab engendra Naassôn ; Naassôn engendra
Salmôn ; 5Salmôn, avec Rahab, engendra Boes ; Boes,
avec Ruth, engendra Yobed ; 6Yobed engendra Jessé ;
Jessé engendra David.
Le roi David,
avec la femme d'Urie, engendra Salomon ; 7Salomon engendra
Roboam ; Roboam engendra Abiya ; Abiya engendra Asaph ; 8Asaph
engendra Josaphat ; Josaphat engendra Joram ; Joram engendra
Ozias ; 9Ozias engendra Joatham ; Joatham engendra
Achaz ; Achaz engendra Ezéchias ; 10Ezéchias engendra
Manassé ; Manassé engendra Amos ; Amos engendra Josias ; 11Josias
engendra Jékonia et ses frères au temps de l'exil à Babylone.
12Après
l'exil à Babylone, Jékonia engendra Salathiel ; Salathiel engendra
Zorobabel ; 13Zorobabel engendra Abioud ; Abioud
engendra Eliakim ; Eliakim engendra Azor ; 14Azor
engendra Sadok ; Sadok engendra Akhim ; Akhim engendra
Elioud ; 15Elioud engendra Eléazar ; Eléazar engendra
Matthan ; Matthan engendra Jacob ; 16Jacob engendra
Joseph, l'époux de Marie, de laquelle est né Jésus, celui qu'on appelle le
Christ.
17Il
y a donc en tout quatorze générations depuis Abraham jusqu'à David, quatorze
générations depuis David jusqu'à l'exil à Babylone, et quatorze générations
depuis l'exil à Babylone jusqu'au Christ.
18Voici
comment arriva la naissance de Jésus-Christ. Marie, sa mère, était fiancée à
Joseph ; avant leur union, elle se trouva enceinte par le fait de l'Esprit
saint. 19Joseph, son mari, qui était juste et qui ne voulait
pas la dénoncer publiquement, décida de la répudier en secret. 20Comme
il y pensait, l'ange du Seigneur lui apparut en rêve et dit : Joseph, fils
de David, n'aie pas peur de prendre chez toi Marie, ta femme, car l'enfant
qu'elle a conçu vient de l'Esprit saint ; 21elle mettra au
monde un fils, et tu l'appelleras du nom de Jésus, car c'est lui qui sauvera
son peuple de ses péchés. 22Tout cela arriva afin que
s'accomplisse ce que le Seigneur avait dit par l'entremise du prophète :
23La
vierge sera enceinte ; elle mettra au monde un fils
et on
l'appellera du nom d'Emmanuel,
ce qui se traduit : Dieu avec nous.
Pourquoi
Matthieu trouve-t’il important d’énumérer tous les ancêtres de Jésus avant de
raconter sa naissance ? D’abord parce qu’en tant que chrétien issu du
judaïsme et s’adressant à des juifs, il tient à prouver que Jésus est bien
le Messie annoncé dans l’AT, descendant d'Abraham et de David.
Il montre aussi que Dieu agit dans l’histoire pour accomplir son plan de salut. Qu’il est un Dieu réel, proche, et un Dieu dont l’amour et la grâce sont plus grands que nos péchés.
1.
Un Messie enraciné dans l’histoire humaine
C’est pour
cela que dès le premier verset, Matthieu présente Jésus comme le « fils de
David, fils d'Abraham ». Ces deux figures-clés de l'Ancien Testament renvoient
aux promesses de Dieu : Abraham est celui à qui Dieu a promis une
descendance nombreuse et une bénédiction pour toutes les nations (Genèse
12.2-3).
David est le
roi à qui Dieu a promis un trône éternel (2 Samuel 7.12-16). En plaçant Jésus
dans cette lignée, Matthieu déclare que Jésus est l’accomplissement de ces deux
alliances. Dieu est fidèle ! Même s’il prend son temps pour accomplir
ses promesses… il finit toujours par le faire, et Jésus en est la preuve
vivante.
Commencer son
récit par une généalogie est aussi une façon de montrer que Jésus n'est pas
un personnage mythique ou isolé, mais qu’il est enraciné dans une réalité
historique et humaine comme chacun de nous. Il est héritier d’une longue
lignée d’hommes et de femmes, comme nous le sommes. Il sait donc ce que la
famille représente de bénédictions… et aussi de fardeaux, parfois, quand
l’héritage est lourd. Le Dieu qui se révèle en Jésus agit là, dans le concret
de la vie humaine. Il n’est pas distant, mais vient agir de la même façon
dans nos vies, dans nos familles, dans nos histoires, aussi complexes ou
brisées soient-elles… pour les guérir, les « racheter », les
sauver : « c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés ».
C’est bien son peuple que Jésus vient sauver, ce peuple juif auquel il appartient par la naissance et par la filiation.
2.
La grâce de Dieu révélée à travers des vies imparfaites
Et les
histoires qui constituent sa généalogie montrent bien combien ce peuple a
besoin de salut !
Disons-le,
dans cette généalogie, Matthieu ne cherche pas d’abord à être exact
historiquement, puisqu’il enlève volontairement certains personnages… ce
qui lui permet d’obtenir de l’ordre : 14 générations, puis 14, puis 14…
une façon de dire : le moment où Jésus naît est bien le temps de
l’accomplissement, celui où le temps prévu par Dieu s’est écoulé.
Mais la façon
dont Matthieu choisit les personnes est surprenante. En général, dans les
familles, on a tendance à mettre en avant les « glorieux ancêtres »
qui ont fait de belles choses… et à enterrer, oublier, éluder ceux qui font
honte à la famille ! Matthieu ne fait pas cela, au contraire. Il
cite notamment plusieurs femmes, ce qui était inhabituel dans une généalogie
juive traditionnelle où seuls les hommes figuraient… Et pas n’importe quelles
femmes : Tamar, Rahab, Ruth et Bath-Shéba (« la femme d’Urie »). Des femmes aux
histoires… pas vraiment lisses !
De fait, Tamar
(Genèse 38) a agi dans une situation moralement ambiguë, assez complexe, une
histoire de filiation dans laquelle elle flirte avec la loi juive, allant
jusqu’à se déguiser en prostituée pour coucher avec son beau-père et assurer sa
descendance… pourtant Dieu a utilisé cette descendance pour faire avancer sa
promesse !
Rahab quant à
elle était une prostituée à Jéricho (Josué 2), mais sa foi a conduit à son
salut et à son intégration dans le peuple de Dieu.
Ruth était
une Moabite, donc une étrangère au peuple de l’alliance, mais sur la base de sa
foi, Dieu a conduit les choses pour qu’elle devienne l’arrière-grand-mère de
David.
Enfin la
femme d’Urie, as Bath-Shéba, évoque l’épisode du péché de David, qui commet
l’adultère avec elle et fait tuer son mari… et c’est de cette union-là que nait
Salomon, un roi choisi par Dieu.
Dans la
liste, il y a aussi tous les rois que Matthieu cite en mélangeant ceux qui
ont été fidèles à Dieu – Asaph, Josaphat… - et ceux qui ont été
infidèles, idolâtres, cruels… - Roboam, Abijah, Joram, Achaz…
Tous ces gens
constituent donc la famille du Sauveur ! Les ancêtres du Fils de
Dieu !? Comment comprendre cela ?
En les
nommant, Matthieu montre que la grâce de Dieu transcende les fautes des humain,
les origines sociales, la marginalité…
Que Dieu sait
accomplir son œuvre parfaite à travers des personnes imparfaites. Parfois
même des personnes qui ne croient pas en lui !
Quel
encouragement pour nous ! Peu importe notre passé ou nos échecs, Dieu veut
nous inclure nous aussi dans son plan de salut. « Si nous sommes
infidèles, lui il demeure fidèle car il ne peut se renier lui-même »,
écrit Paul (2 Timothée 2.13).
Quelles
sont les infidélités, les fautes dont mon histoire familiale est marquée ?
Dieu les connait, et il veut nous libérer de leur poids, nous offrir une
nouvelle filiation, sainte, restaurée – la sienne !
Dans
Explorer la Bible, nous avons médité ce verset : « si
quelqu'un est uni au Christ, il est une nouvelle création : ce qui est ancien a
disparu, une réalité nouvelle est là. 18Tout cela vient de
Dieu, qui nous a réconciliés avec lui par le Christ » (2 Corinthiens
5.17).
C’est bien la
famille humaine telle qu’elle est en réalité, avec ses beautés et ses
zones d’ombre, ses belles actions et ses crimes… que dans sa fidélité Dieu est
venu sauver. Que Jésus est venu continuer… pour la racheter, en changer le
cours. « Il sauvera son peuple de ses péchés ».
Cela ne
dépend pas des mérites de cette famille, de son glorieux passé… ou pas. Mais de
la seule grâce de Dieu.
Il ne s’agit
pas de minimiser le péché commis par certaines de ces personnes, au contraire.
Mais de regarder, au-delà, à ce Dieu qui, tout en mettant en lumière ce péché
pour le juger, a accompli lui-même ce qu’il fallait pour nous en libérer. Au
point de devenir, lui-même, un humain. Il fallait que Jésus soit membre à
part entière de la famille humaine pour pouvoir la représenter devant la
justice de Dieu, et gagner pour elle le pardon, dans sa parfaite sainteté.
Voilà de quel
Dieu nous sommes maintenant les enfants, grâce à Jésus ! Merveilleux
message de Noël.
3.
Croire en Jésus-Christ pour devenir enfant de Dieu
Au final, cette
généalogie nous conduit à réfléchir chacun sur notre propre relation avec ce
Dieu-là. Sommes-nous devenus ses enfants, par la foi ? Croyons-nous que
Jésus de Nazareth était bien le sauveur promis, notre sauveur ?
Dieu a
inclus des gens imparfaits dans la lignée de son Fils. De la même façon, il
nous invite à devenir des membres de sa famille spirituelle par la foi.
Cela ne
dépend pas de nos bonnes actions, mais de la foi que nous accordons à Jésus –
ou pas.
Le Messie est
venu pour inclure les exclus, pardonner les pécheurs et accomplir la promesse
d’une relation restaurée avec Dieu.
Un Père de
l’Eglise, Jean Chrysostome, écrivait au IVe siècle : le Fils de Dieu
« est né selon la chair pour te faire naître selon l’Esprit (…) Je
t’en conjure, réfléchis à ces choses… Il est venu non pour éviter le mal dans
nos vies, mais pour nous en délivrer. ..
Il est venu
comme médecin, non comme juge. Ruth était étrangère et réduite à la dernière
pauvreté ; en la voyant toutefois, Booz ne méprisa ni la pauvreté ni la
basse extraction de cette femme. Ainsi le Christ a adopté l’Eglise, bien
qu’elle soit étrangère et dépourvue de biens »[1].
Alors
acceptons d’être adoptés, afin d’entrer dans la nouvelle famille du Christ !
Cela dépend de nous maintenant.
Questions
Quelles
sont les infidélités, les fautes dont mon histoire familiale est marquée ?
Dieu les connait, et il veut nous libérer de leur poids, nous offrir une
nouvelle filiation, sainte, restaurée – la sienne ! Nous pouvons les lui
remettre.
En même temps, Dieu a aussi manifesté sa fidélité à travers notre famille – biologique ou adoptive. Quels sont ceux qui nous ont précédé par lesquels la foi est parvenue jusqu’à nous ? Rendons grâce au Seigneur pour cela.
En ce temps
de Noël, Dieu nous rappelle qu’il est toujours « Emmanuel », Dieu
avec nous, qu’il est fidèle et plus grand que nos péchés.
Que ces
affirmations nous encouragent, et nous permettent d’entrer dans la paix que le
Père céleste offre à ses enfants.
Amen
[1] Adapté
de L’Evangile médité par les Pères : Matthieu, ed. Olivétan, p. 12
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