Prédication du 8 décembre 24 - 2e dimanche de l’Avent - Luc 3. 1-6 Réorienter nos cœurs et nos actions vers Dieu
Nous sommes aujourd’hui le 2e dimanche de l’Avent. Dans la tradition chrétienne, le temps de l’Avent, de début décembre jusqu’à Noël, est une période importante pour la vie spirituelle. Pendant ces quelques semaines, l’Eglise chrétienne se met à l’écoute de textes qui annoncent la venue du Messie, sa naissance, son « avènement » - son « adventus », d’où le mot Avent.
Ainsi l’Avent, c’est l’attente de la
première venue de Jésus à Noël, qui nous place aussi dans l’attente de sa
2e venue – son retour en gloire et la délivrance qui ira avec, et
qui fonde notre espérance.
En attendant de célébrer Noël, et
alors que les jours raccourcissent, nous sommes invités à plus de lenteur et
plus d’attention à la présence de Dieu dans nos vies, lui qui s’est fait
Emmanuel, Dieu avec nous.
C’est aussi un moment où résonne
pour nous, avec une actualité nouvelle, l’appel de Jean le Baptiste à la
repentance et à la conversion.
Luc 3. 1-6 (NBS)
1La quinzième année du
gouvernement de Tibère César – alors que Ponce Pilate était gouverneur de
la Judée, Hérode tétrarque de la Galilée, Philippe, son frère, tétrarque de l'Iturée
et du territoire de la Trachonitide, Lysanias tétrarque de l'Abilène, 2et
du temps des grands prêtres Anne et Caïphe – la parole de Dieu parvint à
Jean, fils de Zacharie, dans le désert.
3Il se rendit dans
toute la région du Jourdain, proclamant un baptême de changement radical, pour
le pardon des péchés, 4selon ce qui est écrit dans le livre des
paroles du prophète Esaïe :
C'est celui qui crie dans le
désert :
préparez le chemin du Seigneur,
rendez droits ses sentiers !
5Toute vallée sera comblée,
toute montagne et toute colline
seront abaissées,
les passages tortueux
deviendront droits,
les chemins raboteux seront
nivelés,
6et tous verront le
salut de Dieu.
« Préparez le chemin du Seigneur »… Un
appel à la repentance
Le voilà donc, installé au bord du
Jourdain, aux portes du désert, et invitant tous ceux qui l’écoutent à recevoir
« un baptême de changement radical, pour le pardon des péchés ». Ce
n’est pas encore un baptême « chrétien », c’est un baptême
d’attente, de préparation qui exprime pour ceux qui le reçoivent un engagement
au « changement radical », autre mot pour la conversion.
Luc voit dans l’appel de
Jean-Baptiste l’accomplissement des paroles d’Esaïe en 40.1-5
Il est intéressant de les lire
afin de comprendre à quoi Jean-Baptiste fait écho ici.
Au sein du peuple d’Israël, exilé
depuis 50 ans à Babylone, au Moyen-Orient, Esaïe avait fait retentir une
parole d’espérance, annonce d’une libération et d’un retour au pays.
dit votre Dieu.
2Parlez au cœur de
Jérusalem, criez-lui
que son combat est terminé,
qu'elle s'est acquittée de sa
faute,
qu'elle a déjà reçu
du Seigneur
le double de ce qu'elle méritait
pour tous ses péchés.
3 Quelqu'un crie :
Dans le désert,
frayez le chemin
du Seigneur !
Aplanissez une route pour notre
Dieu
dans la plaine aride !
4Que toute vallée soit
élevée,
que toute montagne et toute
colline soient abaissées !
Que les reliefs se changent en
terrain plat
et les escarpements en
vallons !
5Alors la gloire
du Seigneur se dévoilera,
et tous la verront ensemble
– c'est la bouche
du Seigneur qui parle.
Le peuple d'Israël a donc été éloigné de la présence de Dieu à cause de son péché. Mais Esaïe annonce que dans son amour, Dieu va pardonner les péchés du peuple et mettre un terme à cet éloignement.
Comme à l’époque de l’esclavage en
Égypte, Dieu allait se mettre à la tête de son peuple et le reconduire en Terre
Promise. Il faudrait alors réparer les chemins, combler les trous, dégager les
passages impraticables, comme il était d’usage lorsqu’un roi allait visiter
l’une de ses provinces.
Et en effet, cette prophétie s’est
accomplie puisque Dieu a permis que les exilés soient libérés et puissent
revenir à Jérusalem pour reconstruire le temple (Cf livres d’Esdras et
Néhémie).
On voit comment Luc fait ici une application spirituelle de ces événements bien matériels, en jouant au passage sur la ponctuation pour mieux appliquer ces paroles à Jean-Baptiste : là où Esaïe prophétise : « quelqu’un crie : « dans le désert, frayez le chemin du Seigneur », Luc écrit : « C'est celui qui crie dans le désert : préparez le chemin du Seigneur ».
Cette fois, ce n’est plus dans le
désert, mais dans les cœurs que le chemin du Seigneur doit être préparé.
La repentance, un retour vers Dieu
Jean Baptiste appelle ses
contemporains à revenir vers Dieu comme leurs ancêtres de Babylone, mais par
un chemin intérieur cette fois.
La repentance c’est donc
cela : la décision de changer de direction et de revenir vers Dieu. Nos
péchés nous tiennent éloignés de lui, « exilés » loin de lui,
il s’agit de s’en détourner pour se tourner vers Dieu, en demandant son pardon
et sa grâce... et en les acceptant, par la foi, sans besoin de les mériter puisque
Jésus-Christ, dans sa mort et sa résurrection a fait tout ce qu’il fallait
pour qu’ils nous soient acquis.
Dans les milieux évangéliques, on insiste souvent sur les sentiments négatifs qui peuvent accompagner ce mouvement : la culpabilité, le regret, la tristesse…
Certes, ils peuvent être présents,
mais attention à ne pas s’y enfermer, voire s’y complaire : le
sentiment de culpabilité, d’indignité, peut être un marécage qui nous éloigne
encore plus de Dieu. Paul invite à ne pas confondre la tristesse désespérée
que le péché peut produire et la « tristesse qui mène au salut », quand
on prend conscience de là où on en est pour se ressaisir et revenir vers Dieu –
celle-ci est pleine d’espérance, et conduit à la joie !
Ainsi ce qui compte dans la
repentance c’est d’abord le mouvement intérieur, la décision de changer. La
conversion, en grec metanoia, réorientation.
Voilà ce que Jean-Baptiste appelle
le peuple à vivre, et à marquer par le baptême : je prends conscience de
mon éloignement de Dieu et je me retourne vers lui pour le chercher, en croyant
qu’il veut m’accueillir.
Ca peut se manifester par de
grands élans, comme ici – marqués par le baptême – mais pas forcément :
nos vies avec Dieu vont de petites conversions en petites conversions, de
commencements en commencements.
« Nous ne sommes qu’au
commencement des choses. Marchons jusqu’au jour où son amour sera parfait en
nous »[1].
La repentance, une réorientation du cœur et de l’action
Ainsi, les images employées par
Esaïe deviennent donc chez Luc les symboles d’une transformation spirituelle,
intérieure : il s’agit de « rendre droit » les sentiers du cœur,
d’aplanir, d’abaisser…
Très concrètement, on peut y voir
une invitation à modifier certaines choses dans notre façon de penser et
d’agir, afin d’être plus disponibles à la voix du Christ, à son amour.
« Aplanir,
abaisser » : chemin d’humilité. Reconnaitre notre besoin de
Jésus-Christ et notre incapacité à nous sauver nous-mêmes.
« Rendre droits » les « chemins
tortueux » : remise en question de certaines façons
« tortueuses », pas très franche ou honnête, de penser et d’agir.
Paroles médisantes derrière le dos des gens… petits (ou grands !)
arrangements avec la vérité, avec les lois… manque d’honnêteté dans nos
relations…
On parle de
« droiture »… C’est bien cela que Dieu attend de nous : non
pas la perfection, mais la sincérité, la vérité devant lui et devant les autres.
Tant que nous refusons de reconnaitre la réalité de ce que nous sommes et de ce
que nous faisons, nous jouons le jeu de Satan, le père du mensonge, et nous
résistons à Dieu.
Mais son Esprit de lumière et de
vérité vient pointer en nous les choses qu’il veut dénouer, libérer,
clarifier : ne nous cachons pas dans les buissons de la honte, comme Adam
et Eve pour fuir son regard, mais écoutons sa voix bienveillante qui nous
appelle à entrer dans la lumière de son pardon et de son amour, pour vivre
libres dans sa joie !
Mais justement, dans la vie
d’Eglise, nous mettons à part des temps pour faire silence devant Dieu et
réorienter nos cœurs vers lui : cultes, veillée de Noël, méditations
quotidiennes…
La
repentance ouvre le chemin au Règne de Dieu
Ce n’est pas par les moyens de la
puissance humaine que Dieu fait progresser son œuvre, mais par ceux de la
grâce, de l’Esprit ; quand un coeur revient à lui pour être purifié et
transformé, entraînant le changement d’orientation de toute une vie… alors la
route est ouverte pour le Seigneur.
Oui, c’est de l’intérieur vers
l’extérieur que Dieu établit son règne encore aujourd’hui. Alors soyons
vigilants avec ceux qui prétendent agir politiquement pour
« restaurer » l’Eglise, « défendre les valeurs
chrétiennes »… ce n’est pas comme cela que le Christ a établi sa royauté.
Cherchons plutôt à ouvrir nos
cœurs, par un amour authentique, afin que Dieu puisse toucher celui des autres
et les sauver.
La repentance, un acte d’espérance qui ouvre à la joie de Dieu
Ainsi donc, comme les Israélites
au temps de Jean-Baptiste, nous sommes appelés nous aussi, aujourd’hui, à
réorienter nos pensées et nos actions vers Dieu, dans un mouvement volontaire
de retour à lui.
Le Seigneur nous accompagne dans
ce mouvement et nous offre son aide et sa bénédiction. Il est ce Père de la
parabole qui attend sur le chemin que reviennent ses fils et ses filles, ce
Dieu dont les bras sont grands ouverts pour accueillir ceux qui le cherchent
d’un cœur repentant, c’est-à-dire sincère et motivé.
Dieu veut nous « consoler », dit Esaïe. Il a envoyé son Fils parmi nous pour cela. Par sa vie et sa mort, Jésus a montré combien Dieu était « avec nous », de quel amour il nous aime, jusqu’à prendre sur lui le prix de nos fautes, et nous ouvrir gratuitement l’accès à son intimité, pour la vie éternelle.
Ainsi la repentance est un acte
d’espérance qui ouvre à la joie de Dieu, selon la révélation accordée à
Zacharie, son père (Luc 1.77-79) : révélation « du salut par le pardon
de ses péchés, 78grâce à la tendre compassion de notre Dieu. C'est
par elle que le soleil levant brillera sur nous d'en haut
79pour éclairer ceux
qui sont assis dans les ténèbres et dans l'ombre de la mort
et pour diriger nos pas vers le chemin de la paix ».
Alors dans ces semaines jusqu’à
Noël, prenons le temps de nous examiner et de prier.
Osons croire qu’avec Dieu, tout
peut toujours commencer et recommencer.
Ne restons pas loin. Ne
désespérons pas.
Notre libérateur vient bientôt.
Préparons nos cœurs pour
l’accueillir…
Et soyons dans la joie !
Amen
Question
[1] Règle de
Reuilly, « Clé de voûte »
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