Prédication du 30 novembre 25 - Esaïe 2.1-5 - Au milieu des bruits de guerre, "marchons à la lumière du Seigneur » !
Esaïe 2.1-5
1Ce que vit Esaïe, fils d'Amots, au sujet de Juda et de Jérusalem.
2Il
arrivera dans l'avenir que la montagne de la Maison du SEIGNEUR
sera établie au sommet des montagnes
et dominera sur les collines.
Toutes les nations y afflueront.
3Des
peuples nombreux se mettront en marche et diront :
« Venez, montons à la montagne du SEIGNEUR,
à la Maison du Dieu de Jacob.
Il nous montrera ses chemins,
et nous marcherons sur ses routes. »
Oui, c'est de Sion que vient l'instruction
et de Jérusalem la parole du SEIGNEUR.
4Il
sera juge entre les nations,
l'arbitre de peuples nombreux.
Martelant leurs épées, ils en feront des socs,
de leurs lances, ils feront des serpes.
On ne brandira plus l'épée nation contre nation,
on n'apprendra plus à se battre.
5Venez,
maison de Jacob,
marchons à la lumière du SEIGNEUR.
Espérer
au milieu des bruits de guerre
« Il faut accepter de
perdre nos enfants, de souffrir économiquement ».
Vous avez peut-être entendu ces
paroles que le général Mandon, chef d’état-major des Armées, a prononcées devant
les Maires de France le 18.11 dernier. Elles ont provoqué des polémiques
politiques et, sans doute, au sein des familles (et des entreprises !) une
certaine émotion. C’est qu’elles ont résonné dans un contexte de tension
diplomatique croissante, où la menace d’une guerre avec la Russie se fait de
plus en plus concrète. Menace qui s’ajoute aux nombreuses autres qui, déjà,
bouchent l’horizon et rendent l’avenir assez incertain.
Dans ce contexte, la vision
d’Esaïe sonne d’une façon étonnamment actuelle. C’est que malgré ses presque
3000 ans d’âge, elle renvoie à un contexte qui n’est pas si éloigné du nôtre,
malgré les différences culturelles. Surtout, l’espérance qu’elle évoque reste vivante,
car elle a été ravivée par la venue de Jésus-Christ. Comment espérer en
temps de trouble ? Ce passage nous donne des pistes pour cela, comme il
l’a fait pour des générations de chrétiens du passé, qui ont lu eux aussi ce
passage d’Esaïe pendant le temps de l’Avent – le temps de l’attente, de
l’espérance.
« Martelant
leurs épées, ils en feront des socs,
de leurs
lances, ils feront des serpes.
On ne brandira
plus l'épée nation contre nation,
on n'apprendra plus à se battre ».
La vision est belle, les images
fortes. On retrouve la même vision, quasiment mot pour mot, chez le prophète
Michée qui a vécu à la même époque. C’est dire son importance pour le peuple de
Juda.
En ce 8e siècle
av. JC, le royaume est coupé en deux, Israël au nord, Juda au sud, où
Dieu a choisi de se rendre présent dans le temple de Jérusalem.
Autour de Juda, une rumeur monte,
gronde, un bruit de guerre… la présence de plus en plus oppressante de l’empire
assyrien qui est en train, peu à peu, d’engloutir les royaumes de la région et
dont la menace se fait de plus en plus proche…
Dans ce temps d’attente
inquiète, Dieu envoie Esaïe pour interpeler son peuple, qui au lieu de se
confier en lui cherche le réconfort dans le culte des idoles, le plaisir et
l’argent, comme ses voisins païens. Toute ressemblance…
Le premier message de
cette vision est : n’ayez pas peur des Assyriens et de leurs faux dieux, faites
confiance au Dieu vivant.
On pensait alors que les dieux
vivaient sur les montagnes ; or c’est là que le Seigneur va « établir
sa maison », dominant sur les collines comme sur les autres dieux. Une
façon de dire que lui seul est le vrai Dieu, le Dieu vivant.
De plus, la vision annonce
un temps futur où les nations du monde entier afflueront, divinement attirées,
vers Sion, vers Jérusalem, c’est—à-dire vers la présence de Dieu. Dans
un monde où les dieux sont liés aux cultures, aux pays, la vision
d’universalité présentée ici est révolutionnaire : un seul Dieu, un seul
peuple, dans un royaume de paix d’où toute guerre sera bannie.
C’est une incroyable source
d’espérance !
Au milieu des annonces de
jugement, Dieu rappelle ainsi que son véritable désir est de vivre
avec les hommes et de leur apporter la paix et le bonheur en leur
enseignant ce qui est juste.
Une vision réalisée en
Jésus-Christ
Et nous, qu’est-ce que cette
vision a à nous dire ?
Elle nous concerne d’abord parce
que la venue de Jésus lui a donné une nouvelle profondeur.
C’est lui, le nouveau Moïse qui en
Mt 5 enseigne la loi de Dieu depuis une montagne :
« Il nous montrera ses
chemins, et nous marcherons sur ses routes. »
Lui, la « lumière du
monde », qui attire « tous les hommes à lui » (Jean 17), qui
offre son amour et son salut à tous les humains quelles que soit leur culture,
leur langue… et qui les unit dans ce peuple unique et multiculturel qu’est
l’Eglise.
En Christ, « prince de la
paix » (Ésaïe 9.5), c’est bien un royaume de paix que nous attendons.
Christ qui est venu « tout réconcilier avec lui-même… en faisant la paix
par lui, par le sang de sa croix » (Col.1.20).
« Venez, montons à la montagne du
Seigneur » :
Un appel à chercher la présence de Dieu
Plus précisément, la vision
contient deux appels, non pas à rêver à ce qui se passera un jour dans le
monde, mais à répondre ici et maintenant au Seigneur, et ces deux
appels m’ont particulièrement interpelé. « Venez, montons à la montagne du
Seigneur » ; « Venez… marchons à la lumière du Seigneur ».
Tout d’abord, si nous pouvons nous
reconnaître dans ce peuple d’Israël inquiet des bruits de guerre qui se
rapprochent, nous pouvons aussi entendre pour nous l’appel : « venez,
montons à la montagne du Seigneur » - venez, recherchons la présence de
Dieu ! Mettons notre confiance en lui, qui tient le cours de l’histoire
dans sa main, au lieu de chercher le réconfort dans la consommation, le repli
sur soi…
Echo à l’appel à la confiance que fait Jésus sur le même sujet en Mt 24 : « vous allez entendre parler de guerres et de rumeurs de guerre, ne vous effrayez pas » ; « ne vous alarmez pas ». Plus que jamais, résistons à l’inquiétude en recherchant la présence de Dieu. Nous savons que c’est là que nous trouverons la paix.
« Venez…
marchons à la lumière du Seigneur ».
Nous pouvons aussi entendre
pour nous l’invitation du v.5 : « venez… marchons à la lumière du
Seigneur ».
« Marcher à la lumière du
Seigneur », ça pourrait englober toute la vie chrétienne !
Le contexte du passage suggère cependant
quelques applications précises.
Changer
les épées en charrues… est-ce possible ?
Mais avant cela, une question :
est-ce que la vision des épées changées en charrues signifie que nous devons refuser
toute forme de guerre ?
Si la vision évoque un ordre nouveau
que Dieu va établir dans les derniers temps, pour réorganiser le monde
selon sa sagesse et son amour… nous n’y sommes pas encore !
« Martelant leurs épées, ils
en feront des socs ». En matière de guerre, on dit plutôt : « si
tu veux la paix, prépare la guerre ». Bien sûr, face aux réalités de ce
monde, il serait naïf et simpliste de rejeter tout système militaire, de
prôner simplement la non-violence face à des pouvoirs agressifs et
totalitaires.
« On ne brandira plus l’épée
nation contre nation, on n’apprendra plus à se battre ».
Parfois, malgré tout, il faut
se battre. Dans la cour de récréation, pour ne pas être harcelé. Au
travail, pour être respecté. Sur le plan international, pour ne pas être envahi
voire asservis ou tués…
La question de la participation
des chrétiens à la guerre est très ancienne et discutée, il serait intéressant
d’entendre ce qu’en pensent les aumôniers militaires protestants par exemple. Nous
n’avons pas la place d’en parler ici, c’est plus complexe qu’il n’y paraît.
Au niveau individuel, en revanche, il me semble
que cette vision d’un monde où tout à la fois les raisons de la guerre,
la pratique de la guerre et la mentalité guerrière de domination
auront disparu… peut nous inspirer : car sur chacun de ces points, en
suivant le Christ, nous pouvons agir à notre niveau et témoigner du
royaume qui vient.
Nous pouvons au quotidien travailler à démonter les mécanismes de la violence et du conflit et « désapprendre à nous battre ».
Au
nom du Christ, refuser les clivages destructeurs
Cela commence par refuser d’adopter
la pensée du monde : Cf Phil 4.
Ne faisons pas comme Juda qui se laissait
façonner par la mentalité « sans Dieu ». Pour « marcher dans la
lumière du Seigneur », il nous faut déjà nourrir nos pensées de Sa
lumière, de sa Parole de sagesse, des principes qu’elle pose pour opposer l’amour et la paix à la
violence.
Cela nous permettra notamment de résister
à la vision clivée du monde qui justifie les guerres. Les bons, les
méchants. Israël ou Gaza. Immigrés contre français « de
souche » (si cela existe). Contre les polarisations, les nationalismes
qui poussent à la haine de l’autre, nous pouvons opposer l’universalité du
peuple de Dieu, l’unité de l’Eglise : « on ne brandira plus l’épée
nation contre nation ». L’Eglise soit être ce lieu où l’on baisse les
armes les uns contre les autres.
Luttons contre le racisme
destructeur, en valorisant la diversité culturelle de notre communauté, qui est
souvent un tabou.
Comment pouvons-nous valoriser cette diversité dans notre vie d’Eglise ?
Au
nom du Christ, mettre nos forces au service de la paix
Ensuite, éclairés par la Parole
de Dieu, nous pouvons changer nos épées – ce qui fait notre force, nos
capacités, ce que nous pouvons mobiliser pour nous imposer, dominer… - en socs,
en outils au service de la vie, de la paix.
Ex. dons, ressources… au
service de tous. Quid de la compétition dans l’Eglise, entre Eglises ? QQ
je fais de ce que j’ai reçu ? Cf « je ferai de toi une bénédiction
pour les nations ».
Exemple de la gestion des
conflits ; travailler notre façon de communiquer, de dire nos désaccords…
Il ne s’agit pas de nous laisser
piétiner ou d’abandonner toute ambition, tout désir de croissance, mais de
mettre notre motivation et notre force au service du bien, au service des
autres, au service des plus faibles, au service de la justice.
Qu'est-ce que j’ai reçu que je peux mettre au service des autres, pour les élever, les
encourager, les bénir ?
Quel acte d’apaisement puis-je poser dans mes relations
aujourd’hui ?
Conclusion
Au final, soyons convaincus que par
notre fidélité dans les petites choses, nous avons un impact, car le
Dieu vivant est avec nous, en nous, par son Esprit. Il vit au milieu de
nous, il est en train d’établir son royaume, et il nous a appelés à sa
« montagne » pour nous associer à son œuvre de paix : alors ne
nous décourageons pas ! Ne nous dévalorisons pas, mais agissons à
notre niveau !
Laissons-nous encourager et
inspirer par cette vision d’Esaïe.
Face à la déclaration du général Mandon, nous pouvons proposer celle-ci à l'Eglise : « Il nous faut rechercher la présence de Dieu, proclamer l’espérance, et avec le Christ, travailler à la paix en toutes choses ».
Jésus lui-même nous y
invite :
16C'est ainsi
que votre lumière doit briller aux yeux de tous, afin que chacun voie le bien
que vous faites et qu'ils louent votre Père qui est dans les cieux. – Mt
5.16
Que Christ, la lumière du monde,
nous accorde sa paix et éclaire notre chemin, à chacun. Qu’il fasse briller sa
lumière dans nos vies et fasse de nous des ouvriers de paix, des bâtisseurs
d’amour.
Amen
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